mardi 21 octobre 2008

Amélie, aie pitié de moi. épisode 3

Jusqu'à quand ma fierté elle devrait s'en prendre plein la gueule ? Je ne suis pas assez tapageuse, c'est vrai. Peut-être que je ferais bien de lui faire une danse du ventre à l'éditeur ? Qu'en pensez-vous ? C'est comme ça qu'on s'y prend ? Non, il faudrait du talent à ce qu'il parait, juste le talent ; comme Amélie Nothomb : bourrée de talent, un livre par an, des livres qui ont du sens, du travail, de la densité, de la puissance ! Ah c'est donc ça ! C'est pas la jalousie de Christine Angot, c'est juste l'immense talent d'Amélie Nothomb. Incline-toi. Tu n'es qu'une fourmi parmi ces géantes, ces mastodontes de la littérature. Moi avec mes histoires qui font trop réfléchir, ça le fait pas. Ne pense plus. Arrête ! Sois un léopard, toutes griffes dehors !
Depuis un an je me dis "passe à la vitesse supérieure". Mes amis aussi. Y'en a pas un pour me dire que je ferais mieux d'aller planter des tomates. Non, ils m'encouragent les salauds ! Ils prétendent qu'ils aiment mon écriture, que ça a du sens. Eux aussi, ils participent à la conspiration du Néant à leur manière : je ne fais que les décevoir à longueur de temps.
"Alors les réponses des éditeurs ça donne quoi ?" m'a demandé l'autre jour la tendre Laetitia, ma copine qui lit cinq livres par semaine. Elle est formidable dans son genre ; elle a même organisé une lecture de mon roman chez elle. C'est pas de l'amitié ça ? Et moi, qu'est-ce que je lui donne en retour ? Des refus, des lettres sans âme, les certificats de son erreur de jugement. Maintenant, quand elle me présente à quelqu'un, elle prend des précautions gentilles comme tout : "voilà Reine qui est écrivain et bientôt éditée". Ma mignonne, ce que tu t'goures fillette fillette.
Ainsi, je suis devenue l'écrivain de ma bourgade le plus célèbre, sans avoir rien publié. Si je sortais un livre, les quatre mille âmes de mon village iraient se le procurer, comme ça, par amitié. Ca me fait chaud au coeur d'imaginer Dédé revenant de son marché avec ses poireaux et mon bouquin dans son panier ; et puis ma tendre Laetitia qui organiserait tous les cafés littéraires du monde en me présentant comme un grand écrivain, et puis Claudie qui a suivi mon travail depuis le premier jour...

2 commentaires:

Manuel Montero a dit…

Au fond, l'auto-fiction c'est un rapport sur soi. C'est plus immédiat dans L'Age de la Déraison que sur le blog. Laurence Sterne et son ellipse toujours précise (Voyage sentimental, Tristram Shandy) semblent convenir comme modèle d'auto-fiction bloggy.

La contempo-reine a dit…

Oui Manuel, c'est certain. Mais il faut à mon sens distinguer ce qui se fait sur un blog et dans l'oeuvre construite patiemment, dans la solitude de son bureau. L'autofiction "L'âge de déraison" est davantage "romancé" dans la mesure où je ne suis pas peintre et que tout ce qui arrive à l'héroïne ne ressortit pas de moi mais d'une génération interrogée, écoutée.Le blog permet d'épouser le temps de cette attente, presque en temps réel mais avec cette distance qui permet malgré tout d'en rire un peu. Car le travail de l'écrivain aujourd'hui c'est autant faire que faire savoir.